Le 23 juin 2017 a eu lieu à l’EnsAD une journée d’étude sur le cinéma d’animation et le jeu d’acteur.
La relation entre l’animation et le jeu d’acteur est paradoxale. Les aspects graphiques et kinésiques, signification du geste, transformation des figures et de l’espace, représentation sensible, symbolisation des lieux, personnification des éléments, rejoignent les problèmes du langage cinématographique. Du simple signe animé à la coexistence d’un mouvement réel et d’un personnage graphique, l’interprétation d’un rôle varie avec les techniques et selon différents degrés d’anthropomorphisme.
À travers l’histoire de l’animation, le jeu dramatique en animation est passé par différentes formes dont certaines se sont développées et imposées notamment par le biais de la production industrielle. La conception des premiers personnages comme Félix the cat s’appuyait sur des choix des stylisations graphiques associés au jeu d’acteur qui en découlait. Les typologies de jeu favorisées se sont fondées avant tout sur des principes qui concernaient surtout la forme du cartoon, transcrits par Preston Blair. Au-delà de sa version classique et de ses variantes, d’autres démarches ont cherché à s’éloigner de ces formes, avec l’animation limitée, en suivant l’exemple de l’UPA, ou la tendance vers le naturalisme. L’animation 3D et la capture de mouvement perpétuent aujourd’hui dans ses formes industrielles essentiellement, le cartoon et la quête du réalisme.
Parallèlement à cette histoire, l’animation indépendante a développé d’autres formes, beaucoup plus nombreuses, peu diffusées et moins explorées. Ce cinéma se décline en une quantité d’expressions, issues de formes plastiques soumises à l’épreuve du mouvement ; un matériau polymorphe, naturaliste ou stylisé, figuratif ou abstrait, qui peut développer des jeux dramatiques également multiformes. L’évolution historique a déjà fourni certains exemples, mais la majeure partie de ces expressions reste encore à explorer. Le cinéma d’animation indépendant a travaillé jusqu’alors en élargissement plutôt qu’en approfondissement, privilégiant souvent la recherche plastique aux dépens du jeu dramatique et psychologique.
Cette évolution historique de l’animation industrielle et indépendante, suscite de nombreuses questions qui pourraient être discutées :
-Comment la richesse plastique peut-elle se prolonger dans la diversité des mouvements et au-delà dans le jeu dramatique ?
-Un jeu dramatique est-il possible avec une figure non anthropomorphe ?
-Peut-on s’identifier à un personnage graphique simplifié à l’extrême et avec un jeu dramatique minimal ?
-La tradition théâtrale et cinématographique a développé plusieurs formes de jeu d’acteur se partageant entre les grandes approches de l’identification théorisée par Stanislavski et de la distanciation par Brecht. Y a-t-il des attitudes équivalentes en animation ? Comment un cinéma qui s’écarte du trompe-l’œil et dévoile ses conventions de fabrication par définition, se place-t-il parmi ces grandes orientations ?
-Quelle est la contribution du matériau sonore, de la voix dans le jeu d’acteur en animation ?
-Une catégorie du cinéma d’animation correspond à ce que l’on pourrait qualifier de « musique visuelle ». Quel est le rapport de ce type d’expression au jeu dramatique ?
-Quel rapport peut établir le jeu en animation avec la danse, la pantomime, le jeu réaliste ou encore l’opéra?
Cette journée d’étude propose d’aborder ces différents aspects du jeu dramatique (jeu d’acteur) en animation, et dans une perspective élargie d’examiner ses liens avec d’autres formes d’expression.